vendredi 25 janvier 2013

UN PAYS SANS CAPITALE

En ce moment, les déclarations pleuvent sur la relation entre Bruxelles et la Wallonie au sein du monde politique francophone. C'est Paul Magnette qui a, le premier, tenu un plaidoyer étonnant pour "un Etat Wallonie-Bruxelles". Il a été suivi par Olivier Maingain qui a lancé un appel pour une "nation Wallonie-Bruxelles". Le weekend dernier, ce fut enfin au tour de Laurette Onkelinx de plaider, quant à elle, pour un lien privilégié entre Bruxelles et la Wallonie.

Bruxelles et les Bruxellois ont tout intérêt à ce que les différentes communautés et régions de notre pays collaborent de manière intensive. Un tandem Wallonie-Bruxelles exclusif est en contradiction flagrante avec la structure étatique actuelle. En rattachant Bruxelles à la Wallonie, le PS et le FDF enterrent les équilibres institutionnels existants et se font involontairement les avocats du séparatisme qu’ils redoutent pourtant tellement.

De plus, ils ne servent pas la cause des Bruxellois. Sans la Flandre, Bruxelles disposera de moins de moyens financiers et ratera ainsi des opportunités. La Communauté flamande investit chaque année 700 millions à Bruxelles. C’est près de 20% du budget total de la Région de Bruxelles-Capitale et plus que toute l’opération de refinancement dans le cadre de la sixième réforme de l’Etat. Outre des investissements matériels, la Communauté flamande procède également à des investissements immatériels à Bruxelles. Personne ne met en doute le fait que la Communauté flamande enrichit Bruxelles sur le plan de la culture, de l’enseignement, des soins, etc. La qualité de nos institutions néerlandophones à Bruxelles est incontestable et est également très appréciée des francophones.

Pour la même raison, la transformation de Bruxelles en une vraie région-communauté provoquera un appauvrissement énorme. Bruxelles n’a ni les moyens, ni l’envergure suffisante pour se charger seule de compétences communautaires telles que l’enseignement comme le plaident certaines personnalités de Groen. Si l’enseignement était transféré aux régions, il connaîtrait, dans une région bruxelloise extrêmement appauvrie, une diminution de l’offre, une baisse de la qualité et une francisation extrême en un rien de temps. Aujourd’hui, la réalité sur le terrain laisse peu de doute sur ce dernier aspect. Là où les compétences communautaires (enseignement, soins des seniors, crèches, soins de santé, etc.) sont déjà aujourd’hui exercées par des institutions régionales à Bruxelles (commune, CPAS, Interhospitalière Régionale des Infrastructures de Soins, Commission Communautaire Commune, etc.), il existe un « déficit » permanent vis-à-vis des habitants néerlandophones des 19 communes bruxelloises.

La Flandre a tout intérêt à ce que Bruxelles soit bien gérée et sûre. Lorsque Bruxelles éprouve des difficultés, les conséquences s’en font immédiatement ressentir dans la périphérie flamande et au-delà. En tant que membres du CD&V, nous sommes en faveur d’une Région de Bruxelles-Capitale efficace, qui puisse exercer pleinement ses compétences régionales. Cela signifie que, pour le CD&V, la première priorité à Bruxelles doit être de mettre en œuvre la sixième réforme de l’Etat au lieu de se préoccuper déjà aujourd’hui d’une septième réforme de l’Etat.

Mais Bruxelles, en tant que capitale, est également le lieu où les néerlandophones et les francophones cohabitent dans ce pays et se rencontrent sur un pied d’égalité. Elle représente la clé de voûte du modèle institutionnel belge des trois régions et des deux grandes communautés, avec d’un côté la Communauté française, qui aime se faire appeler « fédération Wallonie-Bruxelles », et de l’autre la Communauté flamande Vlaanderen-Brussel.

En tant que membres du CD&V, nous continuons à miser sur le maintien de la vision communautaire pour les compétences communautaires et la préservation des droits et de la protection des néerlandophones à Bruxelles. Nous ne pouvons cependant garantir ces droits que si les néerlandophones à Bruxelles continuent de faire partie et de bénéficier du soutien de la Communauté flamande plus large.

La Communauté flamande inclut Bruxelles. Pour le CD&V, cela va tellement de soi que nous le soulignons trop peu. Car, tout comme Bruxelles ne peut survivre sans la Flandre, la Flandre a besoin de Bruxelles. Bruxelles est à la fois la capitale de la Flandre, de la Belgique et de l’Europe. Bruxelles crée aussi 25% des emplois dans notre pays et 30% du PIB. En outre, un emploi sur trois à Bruxelles est occupé par un flamand. Avec ses nombreux sièges d’entreprises et la présence importante de la communauté internationale, Bruxelles joue également un rôle promotionnel et économique majeur pour la Flandre. Bruxelles, qui est entre-temps devenue la capitale mondiale non officielle des langues étrangères, offre à la Flandre une fenêtre unique sur le monde.

Le CD&V est en faveur d’une région-capitale qui soit ouverte aux deux communautés, sur le même pied d’égalité, et qui développe une collaboration solide avec les deux autres régions. Mais il s’oppose à une région-communauté bruxelloise qui se replie sur elle-même et à une région qui développe un lien privilégié avec la Wallonie. Plus le lien Wallonie-Bruxelles se renforcera, plus Bruxelles perdra son rôle de capitale. Et que reste-t-il d’un pays sans capitale ?

Brigitte Grouwels, Walter Vandenbossche, Brigitte De Pauw, Bianca Debaets

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