mardi 18 décembre 2012

AVOIR RAISON TROP TOT !


Dans Vers L'Avenir du 25 juin 2010 :

Robert Collignon, régionaliste historique, dénonce la cécité des politiques francophones. Il prédit la scission de la Justice et de la fiscalité. Concernant la mise en place d'une circonscription fédérale, il parle d'une idée de boy-scout

Robert Collignon, dans les années 80, le PS était très en pointe sur le régionalisme. Est-ce un retour aux sources pour les socialistes?La situation est très différente de celle des années 80. Nous étions alors avides de compétences. Nous étions demandeurs. Vous avez entendu une seule revendication francophone, vous ? Même Elio Di Rupo ne revendique pas la moindre compétence.

Qu'est-ce qui a changé?En 1999, le Parlement flamand a voté une résolution pour augmenter ses compétences. Tous les partis flamands ont été unanimes dans cette volonté. Et leur programme n'est pas triste. Et qu'ont fait les politiques francophones ? Semblant de rien. Tous les politiques francophones ont souffert pendant dix ans de cécité. Ils ont tous dit non. Tous. Et pas seulement Mme Milquet. Ils ont tous analysé les revendications flamandes comme de la musculation.

Et ce n'était pas de la musculation...Non. Tout d'un coup, aujourd'hui, on est confronté au problème réel. Les Flamands ont persisté dans leur volonté d'autonomie. Les partis francophones ont une lourde responsabilité, celle d'avoir fermé les yeux pendant dix ans. Tout le monde s'est endormi en se disant qu'il fallait sauver la Belgique. On a développé chez les Wallons une véritable phobie de la division du pays en leur faisant craindre une faiblesse sociale. Le message flamand est même passé dans l'inconscient wallon qui s'est cru fainéant. Or la transformation économique est en cours. Le plan Marsahl est en route. Sans la régionalisation, nous n'aurions pas développé cette économie. Et je vais plus loin. Si nous disposions en Wallonie de la compétence sur l'enseignement, nous pourrions aller plus loin dans la lutte contre le chômage.

La réforme de l'État pourrait apporter du bon pour les Wallons...Oui mais maintenant, avec la N-VA, ce sera d'autant plus incisif. Il faut regarder ce qui se passe. On nous annonce la scission de la fiscalité. Le ministre-président flamand, Kris Peeters, l'a encore réclamée mardi. Qu'est ce que ça veut dire scinder l'impôt sur les personnes physiques et celui sur les sociétés ? En quoi les Belges seront-ils encore égaux devant la loi dans ce contexte ? Nous allons passer du fédéralisme de dotations au fédéralisme de responsabilité. Qu'est-ce que ça veut dire ? Actuellement, le niveau fédéral reçoit et puis répartit les dotations aux régions et communautés. Aujourd'hui, la Wallonie est responsable de ses dépenses. Avec une fiscalité propre, elle sera aussi responsable de ses recettes. Ça n'arrivera pas cet été. Mais ils préparent ça. Ce sera pour 2014. En quoi alors pourrons-nous encore parler de Belgique ?Ils sont en train de programmer la fin de la Belgique si on vous écoute...J'ai toujours dit que l'évolution institutionnelle serait permanente. En 1995, on a eu l'impression que le fédéralisme était achevé. J'ai plaidé alors pour qu'on règle nos problèmes intra-francophone. À partir du moment où la région bruxelloise avait été créée, la Communauté française n'avait plus de véritable sens. L'enseignement aurait dû être transféré vers les régions depuis longtemps.

Pourquoi?Les problèmes des Bruxellois et des Wallons sont extrêmement différents. Regardez les problèmes d'inscription dans les écoles. Ça concerne qui ? Bruxelles et un peu le Brabant wallon qui en est le prolongement. Qu'on le veuille ou non ce sont les régions et le principe de territorialité qui sont la base de notre fédéralisme.

Le mouvement régionaliste du PS s'est lui aussi endormi. Il se réveille?Chez Elio Di Rupo, je ne sais pas... Mais je me retrouve assez bien dans Rudy Demotte. Il a raison de faire enfin appeler la région wallonne, la Wallonie. J'ai toujours plaidé en ce sens.

Le PS est le seul parti francophone à ne pas vouloir d'une circonscription électorale unique, une manière de consolider le pays, pourtant...Arrêtons cette bêtise. Ce ne sont pas des francophones qui changeront le vote flamand. Ce sont des idées de boy-scout. Les hommes politiques belges, c'est fini. C'est comme quand Joëlle Milquet veut refédéraliser une compétence. C'est n'importe quoi. Ça n'arrivera jamais.

Pourquoi?On ira toujours vers plus de régionalisation. La justice y passera aussi, vous verrez. Et d'ailleurs, ce n'est pas aussi incongru. Et puis, M. De Wever réalisera son objectif. Il a l'air de mettre beaucoup d'eau dans son vin. Mais je me méfie des gentils intelligents. L'homme est redoutable. Si M. De Wever veut être conséquent, il appliquera son programme séparatiste. S'il ne le fait pas, Kris Peeters (ministre-président flamand CD & V), resté comme un imperator pendant la campagne, le fera à sa place.


18.10.10


 
 

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