mercredi 19 décembre 2012

CONTRIBUTION DE B.WESPHAEL A L'ASSEMBLEE OUVERTE DU 22 NOVEMBRE 2010



Contribution à l’assemblée ouverte du Mouvement du Manifeste wallon
« La Wallonie par choix, non par défaut »
Bernard Wesphael Député Chef du groupe Ecolo au Parlement wallon
Charleroi, 22 novembre 2010

Mesdames et Messieurs, Chers amis,
Je vous remercie vivement pour votre invitation et je tiens d’emblée à saluer votre action et votre détermination même si je ne partage pas nécessairement dans le détail chacune des revendications du mouvement wallon.
Soyons clair même si ce n’est plus un scoop depuis longtemps. La situation générale est difficile : politiquement, économiquement et socialement. Heureusement que les entités fédérées existent. Je n’ose imaginer dans quel chaos nous serions aujourd’hui sans elles…
Institutionnellement, la priorité demeure aujourd’hui l’aboutissement des négociations en cours depuis cinq mois et la conclusion d’un accord équilibré qui apaiserait le climat communautaire pour les dix ou quinze ans à venir.
Pour en venir à notre sujet, je voudrais rappeler deux choses.
UN. La Wallonie n’est pas la Région –et de loin - la plus assistée en Europe et la Flandre est loin d’en être la Région la plus généreuse. Cela, quoi qu’en disent certains Flamands et même – plus grave à mes yeux – certains Wallons, dont les propos confinent parfois à la haine de soi !
DEUX. Les Wallons ont le droit et le devoir d’être fiers de ce qu’ils ont été, de ce qu’ils sont et de ce qu’ils seront. Cela, même si nous traversons une période plus difficile de notre histoire. La prospérité wallonne a alimenté l’essor économique du pays durant cent trente ans.
Je dis cela sans intention de provoquer quiconque, juste pour remettre les pendules à l’heure. Je dis cela, car la vérité a ses droits et j’en ai ras-le-bol d’être injurié depuis des années parce que je suis né en Wallonie et que je serais donc par définition un débile profiteur, fainéant et assisté, vivant au crochet de la Flandre entreprenante et laborieuse !
Marchons la tête haute. Nous en avons le droit et – oserais-je dire – le devoir ! Pour nous-mêmes et pour nos enfants.
N’ayons peurs ni d’être Wallons ni de dire ce que nous voulons pour nous-mêmes. Nous sommes depuis plusieurs mois sinon des années au cœur d’un débat institutionnel. La Flandre a depuis longtemps listé ses priorités, s’y tient et ne cesse de les asséner. Elle ne rate d’ailleurs aucune occasion d’avancer ses pions. L’actualité la plus récente l’a encore démontré.
Malheureusement, une certaine frilosité règne de notre côté. Il n'y a pourtant aucune raison que les Wallons restent muets et ne s’expriment pas dans un débat qui les concerne au premier chef. Ce débat est fort heureusement programmé à court terme.
Comme je l’ai déjà eu l’occasion de le dire, je suis personnellement très attaché à un Etat fédéral basé sur trois ou quatre Régions fortes, selon ce que les Germanophones décideront pour eux-mêmes. En effet, rien ne peut plus désormais se faire à mon sens sans le consentement des populations concernées. Il appartiendra aux différentes Régions qui composeront la Belgique de demain de conclure entre elles autant d’accords de coopération qu’elles voudront ou qu’elles jugeront nécessaires.
Parallèlement à cela, il faut donner à la Wallonie la maîtrise de son destin.
Par conséquent, il nous faut développer un projet wallon propre, décliné dans tous les domaines – économique, social, mais aussi culturel, au sens le plus large du terme. Il nous faut préférentiellement développer ce projet en solidarité avec Bruxelles, sous une forme ou sous une autre, communautaire, fédérative ou coopérative ? La question demeure ouverte, mais dans le respect de l’identité des uns et des autres.

Je m’explique. La solidarité organisée avec Bruxelles est mon option préférentielle. Vu sous cet angle, le développement concomitant d’une identité wallonne forte et d’une identité bruxelloise tout aussi forte n’est dans son principe en rien incompatible avec le développement d’une solidarité commune. Il peut en effet y avoir de très grandes synergies entre Bruxelles et la Wallonie, notamment en matière économiques, environnementales et culturelles, à la condition expresse que l’identité wallonne n’y soit pas sacrifiée. Et pour autant bien sûr que les Bruxellois souhaitent lier leur sort à celui des Wallons !
Attention aussi à tout ce qui tourne autour de la réforme de la loi de financement. Attention également aux effets pervers de dispositions légales apparemment communautairement ou régionalement neutres. J’en veux pour preuve les récentes conclusions du récent Conseil supérieur des finances qui a démontré que la réforme fiscale de 2002-2004 a modifié la clé de répartition de l’I.P.P. à l’avantage de la Flandre au détriment de la Wallonie et de Bruxelles !
Malgré l’ampleur de la tâche, je suis serein. Quoi qu’il en soit de l’issue des négociations en cours, rien ne pourra plus à mon sens entraver l’affermissement de l’identité et du projet wallons. A fortiori qu’en tout état de cause, les compétences confiées à la Région wallonne ne pourront aller qu’en s’élargissant, quel que soit, disais-je, le résultat des négociations en cours.
De ce point de vue, il y aura encore beaucoup de pain sur la planche dans les prochaines années. La Wallonie doit impérativement compléter, améliorer et optimaliser les leviers et les outils dont elle dispose aujourd’hui pour assurer son redressement. Entre autres, elle doit se doter d’un outil financier public enfin digne de ce nom. Cela, afin notamment de financer de grands projets transversaux et fédérateurs, déterminés dans le cadre de la mise en œuvre d’un projet wallon commun s’inscrivant dans le développement durable.
Pour retrouver la forme qui fut la sienne dans le passé, la Wallonie doit aussi se débarrasser des couches de lasagne qui l’alourdissent. Il y a aujourd’hui trop de structures publiques qui s’enchevêtrent en Wallonie, trop d’officines publiques et autres intercommunales qui se marchent sur les pieds. Elles sont évidemment le fruit d’une époque, mais leur utilité n’est plus établie en ce début de vingt et unième siècle.
Evitons tout malentendu. Je ne dis pas qu’il y a trop de puissance publique en Wallonie. Je dis simplement qu’elle doit s’exercer de manière beaucoup plus efficiente et que c’est parfaitement possible.
Bref, il faudra beaucoup rationaliser les instruments disponibles en Wallonie durant les prochaines années. Sur le plan socioéconomique, nous venons de le souligner, mais c’est également vrai aussi sur le plan politique.
Le constat y est tout aussi éloquent :
D’une part, beaucoup dénoncent avec raison les sous-localismes qui nuisent tant à l’instrument de développement cohérent qu’est l’aménagement du territoire.
D’autre part, la vérité est qu’il n’y aura de projet wallon commun que dans la mesure où nous aurons l’identité wallonne forte dont je viens de parler. Les deux devront donc se bâtir simultanément, l’un renforçant l’autre et vice-versa. Une révision du mode électoral et l’instauration d’une circonscription wallonne unique seraient assurément deux moyens de faire progresser le sentiment d’un intérêt général commun et reculer les nombrilismes locaux, en même temps que le clientélisme partisan qui en est trop souvent le corollaire.
En synthèse, une partie des députés wallons serait élue dans une circonscription unique, les autres le seraient sur base des arrondissements actuels de façon à maintenir l’ancrage local et la nécessaire proximité avec le citoyen.
Pour conclure, je dirais qu’il ne faut exclure a priori aucune hypothèse de travail et qu’il importe de les examiner toutes avec le même sérieux en tant que bras de levier possibles dans les négociations en cours. Pourtant, une vérité me paraît d’évidence dans tous les cas de figure.
Pour Ecolo, le plan B pour Belgique signifie une Belgique organisée autour d’un Etat fédéral reposant sur trois ou quatre régions fortes. Cette option fondamentale doit évidemment être poursuivie et aboutir à une solution globale satisfaisante pour toutes les parties, mais le plan A me tient aussi à cœur. Ce plan A est celui de l’Autonomie de la Wallonie. Quoi qu’il arrive demain et quelle que soit l’issue des interminables négociations en cours, nous avons l’obligation et le devoir de prendre notre destin de Wallons en mains. Autant nous y faire et nous y mettre tout de suite.
Mesdames et Messieurs, chers amis, je vous remercie pour votre attention.
BW
13.12.10

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