L’union
« Wallonie-Bruxelles-France » est nécessaire ! – Carte blanche de Paul-Henry
Gendebien, président du R.W.F. (Rassemblement Wallonie-France, dans « Le Soir »
du mardi 24 février 2009
Ainsi l’observateur averti
qu’est M. Fralon ne croit-il plus en l’avenir de la Belgique (Le Soir
des 21 et 22 février). C’est un signe intéressant. Mais il pense à un subterfuge
salvateur : vivement une « petite Belgique » délestée de la Flandre et donc
idéale !Or, celle-ci serait réduite à une nostalgie tenant lieu de
patrie. Un nouveau « petit Belge » ressurgirait une fois encore du tombeau et
procréerait « L’État Wallonie-Bruxelles », un projet qui risque fort d’échouer.
Non pas à cause de sa dimension modeste mais en raison de la ruine de ses
finances publiques et surtout de son inconsistance nationale. Économiquement
chétif et socialement régressif, cet État confetti serait dépourvu du ferment
nécessaire à la création d’un pays : le sentiment
national.Fonder une État wallo-bruxellois, ce n’est pas simplement
prolonger la Belgique ! Il faudrait inventer et organiser un nouvel État au
travers d’une vision, d’une ambition et d’une volonté qu’on n’aperçoit guère
dans notre classe politique. Sans parler de l’expérience pénible de nos pouvoirs
régionaux depuis un quart de siècle…La seule capitale commune
aux Wallons et aux Bruxellois, c’est Paris. Je veux croire à une grande
communauté de destin « Wallonie-Bruxelles », mais celle-ci ne passera que par
une adhésion commune à la France.Hostile au rattachement, M.
Fralon présume que les Wallons préféreront un Premier ministre flamand à un
préfet. Pourquoi cette comparaison bancale ? C’est un Fillon ou un Jospin qu’il
aurait fallu opposer à un Leterme !En présumant une aversion
wallonne à l’égard d’un préfet, M. Fralon semble indiquer sa propre aversion
pour l’État. Il aurait ainsi été la victime d’une belgification réussie puisque
la Belgique est devenue un anti-État.M. Fralon observe que nos
mœurs politiques diffèrent de celles de la France. C’est vrai : chez nous, pas
d’élection du chef de l’État, un régime des partis insupportable, un système
électoral empêchant l’alternance. Mais c’est précisément l’un de nos objectifs :
l’après-Belgique doit nous conduire à une autre culture politique fondée sur les
valeurs républicaines, sur la restauration de l’idée d’autorité publique, sur le
scrutin majoritaire, etc.Il nous faut renouer avec le
principe de l’État arbitre et régulateur, garant des libertés et des
solidarités. Nous le ferons d’autant mieux que la France moderne n’est plus
jacobine et qu’elle s’est régionalisée depuis les lois
Deferre.M. Fralon pense que l’Europe dira non à notre réunion à la
France. Je demande : quelle autorité européenne ? Et au nom de quels principes ?
Depuis 1989, plus de quinze nouveaux États sont nés sur notre continent, et
d’autres ont disparu (Allemagne de l’Est, Tchécoslovaquie, Yougoslavie). Et la
mini Yougoslavie serbe a été partiellement démembrée à son
tour.La plupart des capitales, et l’Europe en général, sont restées
passives, voire complices, devant ces implosions. La posture dominante fut une
hésitation entre deux principes contradictoires : droit sacré des peuples à
l’autodétermination contre stabilité immuable des frontières étatiques. Lorsque
le droit des peuples l’emporta, ce ne fut pas à cause de la vertu de l’Europe,
mais bien parce qu’elle n’avait ni la volonté ni la force de dire non. Et ses
contradictions éclatèrent lorsque, dans la même année, elle reconnut un Kosovo
indépendant puis tenta de préserver l’intégrité de la Géorgie en feignant de
nier les aspirations nationales des Abkhazes et des
Ossètes.L’Allemagne ne s’opposera pas aux souhaits des Wallons et des
Bruxellois. Elle se souviendra de la loyauté française lorsque Paris acquiesça
sans réserve à la réunification de 1990. La Grande-Bretagne semble lassée de
l’Histoire et ne protestera que pour la forme.L’intérêt de l’Europe, c’est
un règlement pacifique de notre crise terminale écartant tout risque de chaos.
La solution française sera un facteur de stabilité évident. Les européistes
eux-mêmes pourraient accepter un élargissement de la France, au même titre
qu’ils saluèrent le volontarisme de la présidence française en
2008L’équilibre européen ne présuppose-t-il pas un équilibre
Paris-Berlin, à savoir une Allemagne consolidée et une France renforcée ? La
réunification allemande autorisait en quelque sorte une prochaine réunification
française.Quelle instance européenne oserait adresser des remontrances
moralisatrices aux « anciens Belges » quand ils voudront se séparer ? Serait-il
convenable que cette Europe, qui s’est construite sur le dépérissement des États
nations et qui a encouragé la plus dure des libres concurrences entre les
régions, veuille sauver contre tout bon sens un État moribond ? Ce serait
paradoxal de la part d’une Union qui se prévaut de l’héritage des Lumières et du
libéralisme démocratique.Enfin, au nom de quelle
logique, l’Europe interdirait-elle à la Flandre ce qu’elle accepta avec un
enthousiasme fébrile pour de nombreuses nations sans État, des pays baltes à la
Slovaquie, de la Slovénie au Kosovo, en passant par le Monténégro ? Et comment
refuser aux Wallons et aux Bruxellois ce qui fut accordé naguère aux six Länder
de l’Allemagne de l’Est ?
Décidément, les nostalgiques
de la belgitude s’évertuent plus que jamais à combattre le projet réunioniste.
Visiblement, celui-ci progresse dans l’opinion publique. On le mesure à
l’inquiétude croissante qu’il suscite dans les milieux politiquement corrects
encore liés à un régime qui se conjugue de plus en plus au passé décomposé.
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