samedi 8 décembre 2012

FUSIONNER REGION WALLONNE ET COMMUNAUTE FRANCAISE ?


Robert Collignon est farouchement opposé à jumeler les scrutins fédéraux ou régionaux. Il l'est tout aussi en ce qui concerne la fusion entre la Région et la Communauté. (belga)


      "Le fait wallon ressemble à du provincialisme"


L'avis de Robert Collignon, ancien ministre- président de la Région wallonne
NAMUR Avec la crise et les Fêtes de Wallonie, on reparle de l'éventuelle simultanéité des élections fédérales et régionales. Mais aussi de la fusion Communauté française et Régions wallonne et bruxelloise. Ancien ministre-président du gouvernement wallon et ex-président du Parlement wallon, Robert Collignon a toujours été un Wallon pur et dur. Il n'exerce plus de responsabilité - "Je m'ennuie avec élégance", dit-il - mais a conservé son franc-parler.
Que pensez-vous de l'idée de faire coïncider les élections fédérales et régionales...
"D'abord, ce serait une négation du fait régional. Toute l'attention porterait sur les élections fédérales qui éclipseraient les régionales."
Et plus concrètement ?
"Ceux qui plaident pour la mise en concordance des scrutins mettent en avant le fait qu'il est mauvais que des partis participent à une majorité fédérale, tout en étant dans l'opposition à la région, et vice-versa. La simultanéité ne résoudrait pas cela : en Flandre, une tripartite est au pouvoir, tandis que la Wallonie est dirigée par un bipartite. Cette asymétrie resterait, en cas de simultanéité des scrutins."
On veut aussi éviter la multiplication des scrutins...
"Le reproche des gens selon lequel on vote trop souvent n'est pas un bon argument : l'homme politique doit insuffler des idées, et non pas être un suiveur."
Vous avez d'autres arguments pour refuser cette simultanéité ?
"Celle-ci obligerait à revoir la législation fédérale, ce qui n'est guère aisé. Ensuite, nul ne semble s'être interrogé sur ce qu'il se passerait en cas d'un blocage au fédéral - comme aujourd'hui - nécessitant un retour aux urnes. Les élections suivantes ne seraient plus simultanées, puisque les régions bénéficient du système de la motion de censure constructive."
Et la fusion Communauté-Régions ?
"Elle exacerberait le face à face entre le Nord et le Sud. Pour moi donc, l'idéal consisterait à transférer les compétences de la Communauté française vers les Régions wallonne et bruxelloise, tout en conservant une assemblée communautaire ayant une fonction purement normative. J'ai déjà proposé cela au début des années 90."
Certains veulent à tout prix conserver la Communauté française ?
"Les premiers à monter au créneau pour la défendre sont ceux qui la président : ils croient qu'ils sont là pour l'éternité. Il vaudrait mieux qu'ils travaillent pour les gens, pas pour eux-mêmes."
Plus généralement, comment expliquez-vous le manque d'identité wallonne ?
"Ce sont les francophones qui ont fait la Belgique et au Sud, il manque une mobilisation du citoyen lambda. Il n'y a pas de mobilisation des patriotes wallons."
L'hymne wallon ou le projet de Constitution wallonne sont des projets portés par des gens qui ne sont pas tout jeunes : cela fait un peu ringard, non ?
"Plusieurs explications à cela : l'attirance des francophones pour la France, le fait que la Wallonie ne rencontre pas de difficultés flagrantes comme le Québec... Et enfin, le manque de soutien de la presse, contrairement au Nord du pays. À la RTBF, l'émission régionale qui précède le JT n'est que du remplissage. Tout cela contribue à faire passer le fait wallon pour du provincialisme."
La faute aussi aux hommes politiques wallons ?
"Beaucoup effectuent une course effrénée après plusieurs lièvres à la fois en se présentant à d'autres élections que les régionales..."
Vous continuez à rêver d'un nouveau Rassemblement wallon ?
"Rétrospectivement, la disparition du Rassemblement wallon a été très dommageable. Ce parti fut sans conteste un aiguillon majeur. Mais aujourd'hui, les gens sont focalisés sur la fin de la Belgique."
Vous êtes amer ?
"Non, il existe une nouvelle génération de parlementaires trentenaires. Et s'il est difficile d'imaginer la création d'un parti en tant que tel, je ne désespère pas que des intellectuels ou des universitaires créent un mouvement..."
Reste que vous semblez bien seul...
"J'ai toujours ramé à contre-courant : du côté francophone, la vie politique manque de dynamisme et la pensée unique y est reine."

Propos recueillis par André Gilain


14.10.07

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